Tintin et trains : toujours sur les mêmes rails !

Une odyssée ferroviaire

Dès la première case de Tintin au pays des Soviets, Tintin et Milou embarquent dans un train en partance pour Berlin. A l'issue de péripéties sans nombre, une foule en délire attend son héros à la gare du Nord, à Bruxelles. A l'entame de Tintin au Congo, le train emmène le jeune reporter de Bruxelles à Anvers. Dans sa première aventure d'après-guerre, Les 7 Boules de Cristal, c'est encore dans un train de la SNCB que Tintin se rend à Moulinsart. Entre Hergé et le train, il n'est pas exagéré de dire qu'il existait une histoire d'amour. Le père de Tintin illustra même des brochures pour la SNCB, la société des chemins de fer belges.

Saviez-vous que...

- On fait remonter l'apparition du chemin de fer en... 1540 ! Des chariots en bois étaient tirés par des chevaux. Pour alléger leur peine, les roues des chariots furent placées sur des rails en bois. Le plus ancien témoignage de ce « chemin de bois » remonte à 1540.

- C'est vers 1715 que le fer remplace les bois, tant pour les roues que pour les rails. Mais le cheval reste le « moteur » de ces ancêtres des trains.

- Au départ, personne ne songeait à transporter des gens dans les chariots : il s'agissait de déplacer des charges lourdes, telles que des minerais ou des blocs de marbre et de granit.

- En Angleterre, on appela ces lignes de chemin de fer, des tramways.

- Le premier chemin de fer, destiné aux voyageurs, fut inauguré en 1802. Il s'agissait du Surrey Iron Railway, qui roula au sud de Londres, à l'initiative de William Jessop. Ce « train » était encore tiré par des chevaux.

Quand Hergé inventa la « BD réalité », avant la « téléréalité » !

Nous sommes en avril 1930. L'aventure de Tintin au pays des Soviets arrive à sa conclusion dans les pages du Petit Vingtième. Le 10 janvier 1929, Tintin et Milou avaient embarqué dans le train, en direction de Berlin ; plus d'un an après, ils reviennent par le train. On les voit passer outre Louvain, Tirlemont avant de gagner le terminus bruxellois, à la gare du Nord. Les rocambolesques péripéties du « journaliste au Petit Vingtième » ont enthousiasmé les jeunes lecteurs... et leurs papas, qui ont fait exploser les ventes du quotidien catholique. Face à ce succès, il n'est pas rare de voir l'imagination des lecteurs s'enflammer et accorder une existence « réelle » à des personnages d'encre et de papier. Cela fait réfléchir Charles Lesnes, journaliste au Vingtième Siècle. En 1928, il a suivi le périple du jeune scout danois, Palle Huld (15 ans  -  l'âge de Tintin), envoyé autour du monde par le quotidien de Copenhague, Politiken. Les exploits de Palle Huld ont défrayé la chronique des pays européens et américains ; ils font l'objet d'un livre de souvenirs, publié en français par Hachette (1928).

Tintin et les trains ? Modernes !

Grâce aux administrateurs catholiques, familiers de l'abbé Wallez, directeur du Vingtième Siècle, Lesnes prend contact avec les responsables des chemins de fer belges. Le but ? Mettre en scène un « retour de Tintin » du pays des soviets. Un succès retentissant : plus de mille jeunes ont rejoint la place Rogier, à Bruxelles, qui fait face à la façade de l'ancienne gare du Nord. Nous sommes le 8 mai 1930. Au cours des années 1930, le chemin de fer a le vent en poupe, pourrait-on dire. Il se démocratise, conquiert de nouveaux espaces et de nouveaux publics. Les gares sont de véritables monuments d'art urbain, les trains, des palaces sur rails ! Le train est vedette de cinéma. Pas de western sans un convoi d'une « railroad company » quelconque. Des crimes sont commis à bord des wagons de l'Orient-Express, renouvelant judicieusement le genre de l'énigme en chambre close. Le « sleeping », où se pavane une certaine Madone, fait rêver, comme aujourd'hui, une voiture de grande marque. Roman, cinéma, récits de voyageurs montent à bord du train. Il ne manque que la bande dessinée. Tintin viendra combler ce vide.

Saviez-vous que...

- Les trains doivent leur existence à l'invention de la machine à vapeur. La première version d'une machine à vapeur date du... premier siècle de notre ère ! Un certain Héron d'Alexandrie construisit un éolipyle, engin très peu puissant, mais qui avançait grâce à l'action de la vapeur. On considéra l'invention comme un jouet... et on l'oublia.

- Le premier véhicule terrestre, mû par la vapeur, a été décrit, en 1668, par le jésuite flamand, Ferdinand Verbiest.

- Les premières machines à vapeur furent des pompes utilisées dans les mines (charbon et autres minerais). Les travaux du Français Denis Papin, joints à des inventions anglaises (notamment, en 1663, par Edward Somerset), aboutirent à la première pompe à vapeur commercialisée, en 1712.

- Le premier moteur à vapeur est l'œuvre de l'Anglais James Watt (1736-1819). En 1784, il dépose le brevet d'une locomotive à vapeur.

- La première locomotive à vapeur a été conduite par un ingénieur anglais originaire des Cornouailles, Richard Trevithick, en 1804.

- Le 27 septembre 1825, George Stephenson conduisit un modèle de son invention, la Locomotion n° 1, sur la première vraie ligne de chemin de fer, inaugurée par la compagnie Stockton and Darlington.

Petit tour en train des albums Tintin

Outre son départ « en fanfare » pour l'Union soviétique, Tintin réutilise le train avant d'embarquer pour le Congo... où il fera une expérience avec les trains, qui ne fit pas plaisir aux autorités belges : il ne fallait surtout pas révéler que les Belges envoyaient leurs vieilles locomotive dans leur colonie ! A Chicago, Tintin débarque d'un train, au moment d'entamer son périple en Amérique. Il part à la conquête de l'Ouest, en train ! En Inde, c''est en train qu'il fait une mauvaise rencontre : les Dupont et Dupond (encore désignés sous le code X33 et X33bis), lancés à ses trousses. Tintin goûte aussi aux chemins de fer chinois pour se rendre à Hou Kou. S'il faut en croire Hergé, les trains d'Amérique latine ne sont pas très sûrs : voyez L'Oreille cassée et Le Temple du Soleil ! Pour faire bonne mesure, les wagons anglais (L'Ile Noire) ne se révèlent pas très paisibles... Avec Le Sceptre d'Ottokar, Le Crabe aux pinces d'or, L'Etoile mystérieuse, Le Secret de La Licorne et Le Trésor de Rackham le Rouge, le train semble rentré en gare. Mais il en ressort dès Les 7 Boules de cristal ! Et un des mérites de L'Affaire Tournesol, c'est d'avoir rendu la gare de Cornavin et sa ligne Genève-Nyon mondialement célèbres !

Des aventures sur les rails

Tintin est bien le... véhicule idéal de la promotion des trains. Instruits par les succès des opérations « Soviet » et « Congo » en gare du Nord, les responsables de la Société Nationale des Chemins de Fer Belges se tourneront tout naturellement vers Hergé pour réaliser une plaquette publicitaire, comportant 34 illustrations. Oui, entre Tintin et le train, on peut parler d'une histoire d'amour. Qui ne faiblira pas. Il fera la connaissance de Tchang en suivant les rails d'une ligne chinoise. Il traversera la Grande-Bretagne et l'Ecosse en train. Il affrontera les Andes par les voies ferrées. Dès la création du Journal Tintin, le 26 septembre 1946, ses lecteurs le retrouveront à bord de l'omnibus qui dessert la gare de Moulinsart. A Genève, Tintin affrontera le monde des espions aux abords de la gare de Cornavin.

Un trésor retrouvé : la plaquette dessinée par Hergé !

A l'occasion de l'exposition Tintin, Hergé et les trains, un facsimile de la plaquette historique, réalisée par Hergé, en 1934 pour le compte de la SNCB, est à nouveau disponible en édition limitée et numérotée ! Ce livret comporte 34 illustrations inconnues d'Hergé, ainsi qu'un texte d'accompagnement. On le trouvera exclusivement à la librairie du Musée Hergé. Les visiteurs de l'exposition se verront remettre un dépliant souvenir gratuit, reprenant, sur une face, l'affiche de l'exposition, et au verso, textes et illustrations en rapport avec l'exposition.