Hergé et la guerre de 39-45

Un conflit sans pitié

70 ans après les faits, on ne comprend plus toujours les réactions des uns et des autres protagonistes. Pourquoi l'invasion de la Pologne provoque-t-elle la guerre ? De précédents méfaits d'Hitler auraient pu aboutir à une déclaration de guerre. Par exemple, l'annexion de l'Autriche, en 1938, n'a suscité que des protestations, modérées et résignées. Le 1er décembre 1938, ce fut au tour de la Tchécoslovaquie (à l'époque, l'actuelle Tchéquie était réunie avec la Slovaquie). Devant ces menées expansionnistes, la France et l'Angleterre annoncèrent que toute action contre la Pologne entraînerait une déclaration de guerre. La France et l'Angleterre s'étaient unies pour garantir l'intégrité du territoire polonais : une attaque contre la Pologne serait considérée comme une attaque contre la France et la Grande-Bretagne. Hitler passa outre cette menace. Le 3 septembre, les deux alliés déclarèrent la guerre à l'Allemagne.

Un dessinateur pas si neutre

Au milieu d'une Europe qui fourbit ses armes, la Belgique est un des pays (avec les Pays-Bas et le Luxembourg, notamment) à se voir garanti un statut de neutralité. Ni pour l'un, ni pour les autres : telle est la devise d'un pays neutre. Dès le mois de septembre 1939, le gouvernement belge donne des instructions tacites à la presse pour que cette dernière conserve un équilibre dans les louanges et les critiques vis-à-vis de l'Allemagne ou des pays alliés. En décembre 1939, Hergé publie un gag de Monsieur Bellum, qui est tout sauf neutre. La chute de la plaisanterie est sans équivoque : " Hitler est un fou " !

A contre-courant

Le gag de Monsieur Bellum est l'un des quatre, parus dans le magazine satirique belge L'Ouest. Hergé y affiche clairement son antinazisme, et le camp qu'il a choisi, celui des Alliés. Curieusement, cette prise de position lui vaudra la rancœur de l'establishment politique belge, car elle brise les diktats que cet establishment impose à la presse. Et cette rancœur poursuivra Hergé jusqu'à la Libération, et participera aux ennuis qui lui seront faits à ce moment-là. Hergé n'était pas homme à hurler avec les loups ou bêler avec les moutons ! Pratiquement tous les albums Tintin naviguent à contre-courant de l'idéologie dominante, qui oublient trop souvent l'humain. Or, le sort des gens, c'est ce qui passionne l'auteur ! Qu'il suffise de se souvenir de ses prises de position en faveur des Amérindiens (Tintin en Amérique), des tziganes (Les Bijoux de la Castafiore) et du peuple tibétain (Tintin au Tibet)...

Quick & Flupke versus Hitler & Mussolini !

Hergé n'a pas attendu 1939 et Monsieur Bellum pour dénoncer l'hitlérisme et le fascisme. Dès le 3 août 1933, les lecteurs du Petit Vingtième découvrent le gag de Quick et Flupke, joliment intitulé " De la musique avant toute chose " ! L'antinazisme d'Hergé est profond et constant : rien à voir avec une pose temporaire...

Syldavie-Blegique ?

Rétrospectivement, Le Sceptre d'Ottokar se révèle bien plus qu'une palpitante aventure. La Syldavie est un petit pays pacifique (oserions-nous dire : neutre ?), dirigé par un roi, pacifiste lui aussi. Dans son entourage, des conspirateurs projettent un coup d'état en faveur d'une puissance étrangère, particulièrement belliqueuse. On ne peut s'empêcher de faire le rapprochement avec la Belgique d'avant-guerre. Dès le 10 mai 1940, les troupes nazies envahissaient ce petit pays. Là encore, Hergé fait un choix clair : Tintin prend fait et cause pour le roi syldave et fait échouer les manœuvres inciviques d'un traître, Müsstler. Un nom dans lequel il n'est guère compliqué de reconnaître les syllabes extraites de deux noms :Mussolini et Hitler !

Une note amusante, tout de meme...

Malgré la disparition progressive des témoins directs, la Seconde Guerre mondiale n'a pas fini de faire parler d'elle. Les polémiques sur les responsabilités allemandes et russes à propos de l'invasion de la Pologne ont resurgi lors de la commémoration de cette agression, en septembre 2009... Mais terminons sur une note plus agréable. Alors que le monde se souvient du début de la Seconde Guerre mondiale, le 1er septembre 1939, un CD est entré dans le Top 20 des ventes, au même moment. L'artiste vient de fêter ses 92 ans ! Dame Vera Lynn était " la " chanteuse anglaise des années de guerre. We'll meet again, The White Cliffs of Dover furent des succès des années de guerre. La compil des succès de Dame Vera Lynn (elle a été anoblie par la Reine) est un des hits de l'été 2009. De la musique avant toute chose !